Le cautionnement a fait couler beaucoup d’encre, conduisant le législateur à introduire lors de l’établissement de la Loi n° 2003-721 du 1 août 2003 pour l'initiative économique, des dispositions d’information et de protection des cautions et continuant à susciter autant d’interrogations.
• Ainsi, en est-il des dispositions protectrices de l’article L 341-4 du code de la consommation
Qui dispose qu’ : « Un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation. » .
Par suite, la jurisprudence est venue préciser que :
- l’identité de la caution :
L'article L.341-4 du Code de la Consommation bénéficie à toutes les cautions personnes physiques, y compris donc à une caution dirigeante d'une société qui garantit les dettes de celle-ci envers un professionnel. (Paris, 1er juin 2007: RJDA 2007, no 1280 ; 25 janv. 2008: RJDA 2008, no 575 ; Reims, 22 mars 2010: Dr. sociétés 2010, no 176, obs. Coquelet.)
- l’appréciation du caractère disproportionné de l’engagement :
Il convient d'apprécier le caractère manifestement disproportionné, d'une part, au moment de la conclusion de l'engagement de la caution et, d'autre part, au moment où la caution est appelée. (Paris, 1er juin 2007: RJDA 2007, no 1280).
La preuve du caractère disproportionné peut résulter des avis d'imposition relatifs à plusieurs années. (Paris, 1er juin 2007 : RJDA 2007, no 1280).
Pour l'appréciation du patrimoine et des revenus de la caution, il ne doit pas être tenu compte des perspectives de succès de l'opération. (Paris, 3 juill. 2008 : RD banc. fin. 2009, no 16, obs. Legeais.), ni des revenus que perçoit le conjoint. (Paris, 6 juin 2008 : eod. loc.).
Selon l'article L.341-4 du Code de la Consommation, la sanction du caractère manifestement disproportionné de l'engagement de la caution est l'impossibilité pour le créancier professionnel de se prévaloir de cet engagement; il en résulte que cette sanction, qui n'a pas pour objet la réparation d'un préjudice, ne s'apprécie pas à la mesure de la disproportion. (Com. 22 juin 2010 : BICC 15 nov. 2010, no 1675).
Il convient de rappeler quelques règles applicables jusque là, à savoir que si le crédit consenti au débiteur principal est manifestement excessif par rapport à ses capacités financières, la banque doit informer la caution en la mettant en garde sauf si elle est considérée comme caution avertie.
- la notion de caution avertie :
Il faut pour apprécier cette notion se rapporter à celle utilisée en matière , d’emprunteur averti, professionnel ou non, gérant ou non, dont il est établi qu’il était « en mesure d’appréhender les risques et l’opportunité du crédit qu’il se préparait à souscrire » (Cass. chambre commerciale du 12 décembre 2006, n° 03-20.176).
La jurisprudence n’exclut pas qu’un emprunteur non totalement étranger à la vie des affaires, de par sa qualité de gérant par exemple, soit qualifié de non averti.
- Ainsi, en est-il également des dispositions protectrices de l’article L 314-3 du code de la consommation modifiée par ordonnance 2006-346 du 23 mars 2006
« Lorsque le créancier professionnel demande un cautionnement solidaire, la personne physique qui se porte caution doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante : "En renonçant au bénéfice de discussion défini à l'article 2298 du code civil et en m'obligeant solidairement avec X..., je m'engage à rembourser le créancier sans pouvoir exiger qu'il poursuive préalablement X...".
Là encore, la jurisprudence est venue préciser :
- la sanction issue de l’absence du respect de ce formalisme :
L'engagement de caution solidaire, souscrit dans le respect des dispositions de l'article L 341-2 du code de la consommation, ne comportant pas la mention manuscrite exigée par l'article L 341-3 dudit code, demeure valable en tant que cautionnement simple ( Cour de Cassation 8 mars 2011. Pourvoi 10-10699).
- Enfin, la question a été abordée de l’engagement des époux, lorsque dans le cadre de l’exercice d’une activité professionnelle de l’un, l’autre époux se porte caution et du sort de cet engagement en cas de séparation.
Madame le Ministre de l’Economie a rendu une réponse ministérielle en date du 1er mars 2011 n° 82460 sur la question : « si une information plus stricte de l'époux qui se porte caution ne peut pas être mise en place, et s'il est possible de faire une distinction entre les cautionnements portés sur les biens nécessaires à la vie courante du couple (logement, biens de consommation), de ceux portés sur les biens liés à l'exercice professionnel ne concernant qu'un seul des deux époux. » en indiquant que plusieurs dispositions législatives assurent déjà cette protection de la caution personne physique conjoint ou non du débiteur principal, et sont jugées suffisantes.
Il est donc rappelé à la caution engagée au profit de son conjoint,
- qu’elle reste tenue en cas de divorce,
Sauf les exceptions prévues par le législateur et résultant des dispositions du code civil, à savoir :
- que le contrat de cautionnement doit être donné de manière libre et éclairé, à défaut, il serait nul,
- il doit être conclu de bonne foi,
- il est précisé que lorsque l'un des époux marié sous le régime de la communauté légale contracte un emprunt ou un engagement de cautionner la dette d'autrui, la loi accorde une protection particulière aux biens communs du ménage.
- Ainsi, l'article 1415 du code civil dispose que chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint, qui, dans ce cas, n'engage pas ses biens propres.
- Il est précisé également que les créanciers de l'un des époux ne peuvent poursuivre le recouvrement de leurs créances sur les biens communs du couple qu'à condition que l'autre époux ait donné son accord à l'emprunt ou au cautionnement.
- Et lorsque le divorce est prononcé, l'article 1387-1 du code civil prévoit que si des dettes ou sûretés ont été consenties par les époux, solidairement ou séparément, dans le cadre de la gestion d'une entreprise, le tribunal peut décider d'en faire supporter la charge exclusive au conjoint qui conserve le patrimoine professionnel ou, à défaut, la qualification.
Une grande vigilance est donc exigée avant tout engagement afin de se prémunir et protéger sa famille.
Source : Me Déborah BENECH, Avocat à la Cour